PARET-ESCUDIÉ Urbain

 

Né le 23 mai 1898 à Saint-Laurent-de-la-Salanque (Pyrénées-Orientales), mort à Belvis (Aude)  le  7  août  1944,  abattu  par  les  Allemands  ;  ouvrier  agricole  puis  comptable  et agent  d’assurances  à  Saint-Laurent-de-la-Salanque  ;  militant  socialiste  SFIO  et syndicaliste  ;  adjoint  au  maire  de  Saint-Laurent-de-la-Salanque  ;  conseiller d’arrondissement de Saint-Laurent-de-la-Salanque ; résistant (MUR).

 

Urbain  Paret-Escudié  était  le  fils  posthume  de  Paul  Paret-Sorède,  maçon  âgé  de  trente-trois ans    décédé  à  Saint-Laurent-de-la-Salanque  le  8  mai  1898.  Sa  mère,  Thérèse,  Anne Escudié était âgée de vingt-neuf ans à la naissance de son  fils. Il était connu sous  le double patronyme de son père (Paret) et de sa mère (Escudié). L’usage local de Saint-Laurent-de-la-Salanque avait rendu cette pratique quasi-générale. Si les deux noms paternel et maternel ne figuraient  pas  sur  les  actes  proprement  dits  des  registres  de  l’état  civil,  ils  étaient systématiquement  consignés  sur  les  tables  annuelles  et  décennales  de  ces  documents  et d’usage public courant.

Urbain  Paret-Escudié  s’engagea  volontairement  à  la  mairie  de  Perpignan  (Pyrénées-Orientales) le 2 août 1916 au titre du 5e dépôt des équipages de la Flotte où il demeura durant tout  son  séjour  sous  les  drapeaux.  Il  fut  promu  quartier-maître  commis  aux  vivres  le  1er octobre  1918.  Il  fut  libéré  de  ses  obligations  militaires  le  1er décembre  1919.  Deux commissions de réforme successives (10 septembre 1924 et 28 juin 1928), tout en constatant des  séquelles  de  paludisme,  déclarèrent  son  maintien  au  service  armé.  Il  passa,  en  cas  de mobilisation, à l’armée territoriale le 1er octobre 1930 et à la réserve de l’armée territoriale le 1er octobre 1937.

Urbain  Paret-Escudié  fut  avec  Augustin  Joué-Delmas*  et  Laurent  Vidal-Barragué  l’une des  trois  grandes  figures  de  la  gauche  laurentine  de  l’entre-deux-guerres.  S’il  fut vraisemblablement  membre  de  la  franc-maçonnerie  (de  quelle  obédience  ?),  il  n’adhéra jamais au PC bien que, dans son village, il était universellement connu sous le surnom de « Paret-Lénine  ».  Animateur  de  la  vie  politique  et  sociale  de  Saint-Laurent-de-la-Salanque, peuplé à la fois de marins, de pêcheurs et de vignerons, il était, par ailleurs, bien inséré dans les milieux de la gauche perpignanaise. Du fait, sans doute, de ses activités professionnelles,

il faisait, tous les jours, le trajet entre son village et la capitale du Roussillon. Urbain Paret-Escudié avait su s’imposer comme un des leaders politiques et syndicaux des « Rouges » de Saint-Laurent-de-la-Salanque. Ce gros bourg fut partagé, avant 1939, de façon irréductible entre « Rouges » et « Blancs », souvent monarchistes, dichotomie qui remontait au moins aux temps de la Seconde République. Cette opposition se manifestait dans tous les aspects  de  la  vie  sociale.  Les  débats  politiques  étaient  très  animés  et  les  conflits  sociaux (grèves d’ouvriers agricoles) se caractérisaient par leur âpreté.

Si  Urbain  Paret-Escudié  militait  activement,  sa  femme  était,  au  contraire,  très  réservée. D’un tempérament très différent de celui de son mari, elle s’affichait peu en public avec lui. Urbain Paret-Escudié milita très jeune. Ouvrier agricole —ce fut son premier « métier »— il devint après  le départ de Llong* secrétaire de  la « chambre syndicale  des  travailleurs  de  la terre » (CGT) de Saint-Laurent-de-la Salanque. Il fut secrétaire du congrès départemental des Agricoles  (CGT)  qui  se  réunit  à  la  Bourse  du  travail  de  Perpignan  le  15  février  1920.  Il participa  activement  à  la  rédaction  du  contrat  collectif  proposé  par  le  syndicat  de  Saint-Laurent-de-la-Salanque que Jacques Tarrès* avait présenté à l’assemblée. Urbain Paret-Escudié militait également dans les rangs du Parti socialiste SFIO. Il fut élu secrétaire adjoint de la section socialiste de  Saint-Laurent-de-la-Salanque.  Après  le congrès de Tours, il demeura à la SFIO. En mai 1925, il fut candidat à Saint-Laurent-de-la-Salanque sur la «  liste républicaine d’union des gauches  »  conduite  par  Augustin Joué-Delmas et  fut élu au conseil municipal. En 1926, en tant qu’adjoint au maire de sa commune, il siégeait à la commission administrative fédérale de la SFIO. Il fut à nouveau élu à la CAF par le congrès fédéral extraordinaire du 27 septembre 1931 et réélu par le congrès fédéral extraordinaire du 30 octobre 1932.

À  cette  époque,  Urbain  Paret-Escudié  demeurait  proche  des  syndicats  confédérés.  Il s’associa à leur initiative de création de la caisse primaire d’assurances sociales « Le Travail des  Pyrénées-Orientales  ».  Il  participa  à  l’assemblée  générale  constitutive  de  la  caisse  (26 janvier 1930) et fut élu à son bureau. Le 22 mai 1932, il fut réélu au CA de la caisse. La  section  socialiste  SFIO  de  Saint-Laurent-de-la  Salanque  connut  une  éclipse.  Elle  fut reconstituée  la  25  novembre  1934  :  Urbain  Paret-Escudié  fut  élu  secrétaire.  En  décembre 1934, la section socialiste SFIO de Saint-Laurent-de-la-Salanque groupait, d’après un rapport du préfet au ministre de l’Intérieur, quatre-vingt cotisants. Urbain Paret-Escudié fut le candidat de la SFIO au conseil d’arrondissement de Perpignan dans le canton nouvellement créé de Saint-Laurent-de-la-Salanque (scrutin des 5 et 14 avril 1935). Dès le premier tour, il se plaça en tête devant tous ses concurrents. Il obtint 548 voix sur  1417  suffrages  exprimés  (Marc,  radical-socialiste,  321  voix  ;  Lasserre,  radical indépendant,  65  voix  ;  Cantier,  Action  française,  410  voix  ;  Fernand  Castany*,  PC,  163 voix). Au second tour, il l’emporta avec 760 voix contre 325 à ses adversaires. En 1936, il participa activement à la campagne de Ferlat*, militant héraultais que la SFIO présenta  aux  législatives  contre  le  député  sortant,  le  «  dissident  »  Joseph  Rous*.  Il  suivit Ferlat non seulement en Salanque, mais aussi en Conflent Le 4 juillet 1938, il fut élu vice-président du conseil d’arrondissement de Perpignan, alors que Michel Carola* et Fernand Baixas étaient élus respectivement président et secrétaire de cette assemblée. Urbain  Paret-Escudié  fut  élu  membre  suppléant  de  la CAF par  le  congrès  fédéral  du  29 mai 1938 et réélu par celui du 29 mai 1939. Le 7 janvier 1939, il fut élu, en même temps que Joseph  Bonnet, membre du  bureau  de  la  section  socialiste  de  Saint-Laurent-de-la-Salanque (Voir aussi Fabre Sébastienne).

Le  30  août  1939,  Urbain  Paret-Escudié  fut  mobilisé  à  Toulon  (Var)  dans  l’artillerie  de côte.

Pendant  la  Seconde  Guerre  mondiale,  il  participa  activement  à  la  Résistance.  Membre  des MUR (sans doute était –il de « Libération » comme la majorité des socialistes résistants des Pyrénées-Orientales ? ). Le 11 avril 1944, il dut quitter précipitamment son domicile de Saint-Laurent-de-la-Salanque, alors que la Gestapo s’apprêtait à le perquisitionner et, sans doute, à procéder à son arrestation. Il alla d’abord à Estagel (Pyrénées-Orientales) puis gagna Belvis un  village  du  Pays  de  Sault,  dans  les  Pyrénées  audoises.  Le  7  août  1944,  ce  village  qui abritait  d’autres  personnes  recherchées  par  la  police  allemande  fut  encerclé  par  des  forces allemandes  qui  attaquaient  le  grand  maquis  (AS)  de  Picaussel  auquel  il  était

vraisemblablement rattaché. Urbain Paret-Escudié prit peur. Alors qu’il tentait de s’enfuir, il fut  abattu  d’une  rafale  de  mitraillette,  la  troisième  qui  fut  tirée  dans  sa  direction.  Il  fut d’abord sommairement inhumé par les villageois de Belvis. Ses obsèques civiles solennelles eurent  lieu  dans  son  village  natal  le  23  septembre  1944.  L’avenue  Maréchal-Pétain  fut débaptisée et porte, depuis, son nom. Sur son registre matricule est consignée une mention au crayon : "Victime  barbarie allemande. Four crématoire". Elle est manifestement erronée. En fait une erreur a été commise par l’administration militaire. Le feuillet d’adjonction  destiné au f° 239 (Paret Urbain) a été collé sur le f° 238 (Parès Achille, né le 10 avril 1898 à Saint-Laurent-de-la-Salanque).  Sur  le  feuillet  additif  qui  fut  attribué  à  tort  à  Achille  Parès,  on retrouve  les états de service d’Urbain Paret-Escudié dans  la Résistance  : "Du 1er septembre 1943  au  7  août  1944  a  servi  dans  les  FFI".  Il  y  est  mentionné  comme  ayant  appartenu  au grand  maquis  [AS]  de  Picaussel  (Pyrénées  audoises)  qui  affronta  avec  succès  les  troupes allemandes.  Il  se  trouvait  sans  doute  pour  ce  motif  à  Belvis  le  7  août  1944  ainsi  que  le suggère Lucien Maury dans sa chronique de la résistance audoise. Le registre matricule, dans la mention attribuée par erreur à Achille Parès, dit explicitement qu’il [en fait Urbain Paret-Escudié] fut "fusillé par les Allemands à Belvis (Aude) le 7 août 1944. Mort pour la France".

Un certificat d’appartenance d’Urbain Paret-Escudié aux FFI (n° 2743) fut délivré le 7 avril 1951 par la 5e région militaire (Montpellier).

Marié  le  24  septembre  1921  à  Saint-Laurent-de-la-Salanque  avec  Mercédès  Pla,  Urbain Paret-Escudié avait une fille âgée de 22 ans en 1944 mariée avec Michel Drapé. Celui-ci put avertir à temps son beau-père afin qu’il quittât Saint-Laurent-de-la-Salanque, en avril 1944.

 

SOURCES : Arch. dép. Pyrénées-Orientales, 2 M 5 268 II ; versement du cabinet du préfet, 13 septembre 1951, liasse 177 (cotes anciennes) ; 1 R 543, registre matricule, f° 239 (Paret Urbain) et f° 238 (Parès Achille). — Arch. com. Saint-Laurent-de-la-Salanque,  registres  de  l’état  civil. —  Ramon  Gual  &  Jean  Larrieu  ,  «  Vichy,  l’occupation  nazie  et  la  Résistance catalane  »,  II  b  «  De  la  Résistance  à  la  Libération  »,  Terra  Nostra,  93-94-95-96,  Prades,  1998,  p.  923,  p.  931.  — Jean Larrieu, « Vichy, l’occupation nazie et la résistance catalane », I  « Chronologie des années noires », Terra Nostra, 89-89, Prades, 1994, p. 328. — Lucien Maury, La Résistance audoise (1940-1944), tome II, Carcassonne, Comité d’Histoire de la Résistance audoise, 1980, 443 p. [p. 396]. — Le Cri catalan, organe départemental officieux de la SFIO, 6 février 1920, 8 mai 1926, 7 juillet 1928. — Le Cri socialiste, organe départemental officiel de la SFIO, 20 décembre 1930, 3 octobre 1931, 5  novembre  1932,  8  décembre  1934,  13  avril  1935,  20  avril  1935,    Le  Socialiste  des  Pyrénées-Orientales,  organe départemental de  la  SFIO,  3 juin  1938,  8 juillet  1938,  13  janvier  1939,  26  mai  1939. — L’Action  syndicale,  organe  des syndicats confédérés des Pyrénées-Orientales, mars 1920, février 1930, juin 1932. — Le Républicain, quotidien, Perpignan, nécrologie, 21 septembre 1944, 24-25 septembre 1944. — Témoignage oral de Mme Madeleine Rousseau, née Guillaume, originaire  de  Saint-Laurent-de-la-Salanque,  Latour-de-Carol,  22  juillet  1983.    Renseignements  communiqués  par  le secrétariat de la mairie de Saint-Laurent-de-la-Salanque, lettre du 24 novembre 1982.

ICONOGRAPHIE : Le Républicain, Perpignan, 21 septembre 1944.

 

André BALENT